Le safran de Taliouine
Taliouine, la capitale du safran, est située dans la province de Taroudant. Entourée par une chaine de montagnes dans le Siroua, Taliouine regroupe la quasi-totalité de la production du safran au Maroc. Grâce à sa situation géo-climatique très spécifique, la zone de Taliouine représente une aire extraordinairement favorable au développement du safran.
Le safran, ou « crocus sativus L » dans le vocabulaire scientifique, est une fleur de couleur mauve de la famille des Iridacea, dont les stigmates rouge vif fournissent, une fois séchés, l’épice la plus chère du monde, également appelée « safran ».
Employé comme condiment et colorant il entre dans la composition d’un grand nombre de spécialités de la cuisine marocaine et sert à aromatiser le thé dans la région de Taliouine. Mais le safran n’est pas connu seulement pour son goût ; il semble même que ses vertus médicinales, son fort pouvoir tinctorial et son parfum aient historiquement été exploités avant ses qualités gustatives. Encore utilisé pour la préparation de certains médicaments il est utilisé depuis toujours dans la médecine traditionnelle à la fois pour stimuler et pour calmer les spasmes, les maux de dents, les règles douloureuses… ingéré en grande quantité (plus d’un gramme) il peut devenir nocif.
Bien que son prix élevé tende à faire disparaître cet usage tinctorial, le safran est traditionnellement employé pour la coloration des tissus et de la laine servant à tisser les tapis berbères, ainsi que comme pigment pour les maquillages de fêtes.
CULTURE DU SAFRAN
La culture du safran est précédée d’un labour profond (35 à 40 cm) qui se fait en été, suivi de travaux superficiels pour ameublir le sol. Dans les petites parcelles de la région de Taliouine, ces travaux sont généralement faits à la main.
Les fleurs étant stériles, la plantation des bulbes, reproduits par multiplication végétative, se fait chaque année. Au moment de la plantation, le choix des bulbes – qui doivent être de grand calibre, sains et non blessés – est fondamental. La plantation se fait de la fin de l’été, en lignes espacées de 20 à 35 cm. Les bulbes choisis sont placés manuellement en paquets (de 3 à 5) à une profondeur d’environ 15 cm. Après la plantation, il est nécessaire d’irriguer.
RÉCOLTE DU SAFRAN
RAMASSAGE DES FLEURS
Le ramassage des fleurs du safran est une opération très délicate qui exige une main d’œuvre importante. Dans les petites exploitations familiales, les membres de la famille, les femmes en particulier, s’occupent de collecter et de sécher les stigmates de safran.
Échelonnée sur plusieurs semaines la floraison du safran connaît un pic (autour de la dernière semaine d’octobre) où plus de 60 % des fleurs émergent en même temps. Les fleurs doivent être cueillies rapidement, avant leur ouverture, pendant les deux ou trois heures matinales qui précèdent l’arrivée des chaleurs du jour, afin d’éviter la fanaison très rapide des stigmates.
SÉPARATION DES STIGMATES
Après la récolte, les fleurs sont apportées à la maison pour la séparation des stigmates des autres parties de la fleur. Cette opération délicate réalisée du bout des doigts par les femmes, doit être menée le jour même de la récolte afin d’éviter une macération qui altérerait le goût du safran. Les précautions prises lors de la récupération des stigmates conditionnent la qualité du produit.
SÉCHAGE DES STIGMATES
Une fois les stigmates isolés, ils sont séchés à l’ombre pour éviter le contact direct avec le soleil, qui dégrade la qualité du safran. Après séchage, le safran perd quatre cinquièmes de son eau. Il faut environ 150 000 fleurs (300 kg) pour obtenir 5 kg de stigmates frais qui donneront 1 kg de safran sec.
CONSERVATION DU SAFRAN
Stocké à l’abri de la lumière et de l’air dans un récipient hermétique, le safran peut conserver pendant plus de trois ans toutes ses qualités. L’utilisation des boites en verre colorées ou opaques, fermées hermétiquement et placées dans des endroits secs, constitue la meilleure méthode de préservation de la qualité du safran.
LES ZONES DE PRODUCTION
La zone de Taliouine située à l’ouest du Siroua couvre environ 500 ha. On estime à plus de 3 000 le nombre de parcelles de culture, étagées entre 1 200 et 2 400 mètres d’altitude. Le safran est produit par 1 370 familles. L’extrême complexité du relief de cette zone de montagne semi-aride explique la dispersion des sites cultivés et leur concentration autour des points d’eau (sources, puits et stations de pompage).
La valeur du safran de Taliouine bénéficie d’une réputation mondiale, sa qualité n’étant à nulle autre pareille. Lors d’une récente édition du festival de Taliouine, Driss Samih, directeur général de la coopérative Souktana, l’une des plus anciennes structures, avait affirmé que le Maroc est le seul pays d’Afrique à produire du safran bio et que son pouvoir colorant dépasse de très loin celui de l’Iran, car compris entre «228% et 240%, il dépasse largement celui du safran cultivé en Iran (160%)».